du Mardi 2 Décembre 2014

article rédigé par Paul-Henri COSTE 

L’attractivité de l’agglo étudiée par Toulon@Venir

L’association a réalisé une étude comparative sur l’attractivité de l’agglomération par rapport à ses homologues nationales. Selon elle, il est urgent d’inventer une nouvelle dynamique

Pyramide des âges, taux de scolarisation, catégories socioprofessionnelles de la population, mode de transports utilisé, niveau de revenu…

A la manière des magazines friands de classements, l’association Toulon@venir, agissant en qualité « d’association citoyenne » s’est lancée dans une étude comparative destinée à mettre en lumière l’attractivité de l’unité urbaine toulonnaise. « Il ne s’agit pas de dresser le bilan du maire actuel », désamorce d’emblée Valentin Giès, président de Toulon@venir, « les tendances se sont dessinées sur plusieurs décennies C’est le résultat d’au moins 40 ans de politiques locales. »

Sans chercher à faire porter le chapeau à quiconque, l’association est cependant sévère sur le niveau de performance de l’agglomération varoise.

« Chacun des maires a eu sa part »

« Nous avons voulu comparer, sur la base des chiffres publiés par l’Insee, l’attractivité de Toulon par rapport à celle d’autres unités urbaines de même taille et dynamique. Et les résultats montrent que Toulon est loin d’être dans le peloton de tête. Ce que nous déplorons, d’autant que la ville a des atouts immenses et indéniables en termes d’attractivité, de par sa situation géographique, sa préservation naturelle, son climat et son art de vivre. (…) Les indicateurs économiques d’un territoire sont le fruit de l’histoire de celui-ci. Les comparaisons doivent donc être prises avec précaution (…) Mais force est de constater, au travers des indicateurs Insee étudiés, que la situation des quatre unités urbaines dynamiques que nous avons considérées est très similaire et que les ratios sont tous communs à quelques pour-cents près. A l’inverse, les chiffres correspondant à Toulon sont quasiment tous très éloignés de ceux des villes dynamiques ».

Selon Toulon@venir, la raison de ce décrochage est à chercher dans l’absence de renouvellement du modèle toulonnais. « Pendant des siècles, Toulon a eu une mono-activité militaire. Cette situation a commencé à évoluer à partir de 1975 et des chocs pétroliers.  Nous sommes aujourd’hui 40 ans plus tard. Cette mutation aurait pu être un immense succès (…) Il n’est pas question d’accabler quiconque, mais chacun des maires qui se sont succédé depuis 1974 a sa part dans le manque de compétitivité et d’attraction de notre territoire.»

Paul-Henri COSTE phcoste@varmatin.com

L’intégralité de l’étude, ainsi que les dossiers de l’INSEE sont consultables sur le site internet de l’association. 

https://www.toulonavenir.com/lattractivite-economique-de-toulon/

Méthodologie

Nantes, Grenoble,Strasbourg et Montpellier

En se saisissant des chiffre publiés par l’Insee (Institut national de la statistique et des études économiques) Toulon@venir a mis en compétition les indicateurs fournis pour Toulon, Nantes, Grenoble, Strasbourg et Montpellier.

Cinq « unités urbaines » accusant de 4 à 600 000 habitants en 2011.

Unité urbaine

L’ Insee définit l’unité urbaine comme  « une commune ou un ensemble de communes présentant une zone de bâti continu (pas de coupure de plus de 200 mètres entre deux constructions) qui compte au moins 2000 habitants. »

Appliqué à Toulon, cela fait partir la zone d’étude de Cuers à La Ciotat.

– Douai-Lens et Rouen aussi

Toulon@venir a fait le choix de comparer Toulon à quatre agglomérations très dynamiques. Elle ferme les yeux cependant sur le cas de Douai-Lens et Rouen, deux villes comprises aussi en 4 et 600 000 habitants. « On veut se comparer aux premiers de la classe, pas aux derniers » , explique Valentin Giès.

Pour y voir plus clair, Var-matin a choisi d’y jeter un œil.

Pas assez d’emplois attirés

L’indicateur de concentration d’emploi stipule le nombre d’emplois dans la zone pour 100 actifs ayant un emploi et résidant dans la zone.

  • avec quelque 125 emplois pour 100 actifs travaillant et résidant sur zone, Nantes, Grenoble, Strasbourg et Montpellier attirent les emplois.

  • A Toulon, cet indicateur est de 98. En clair, sur 100 Toulonnais qui travaillent 98 seulement le font dans l’unité urbaine. « Cette situation toulonnaise est catastrophique est très certainement le fruit d’un héritage laissé par des décennies de manque de volonté dans le dynamisme économique local », grince Toulon@venir.
  • Pour compléter l’étude de l’association, notons que cet indicateur est également de 98 à Rouen et de 92 à Douai-Lens.

Les 15-29 ans ne viennent pas

Les jeunes sont-ils attirés par la ville pour faire des études et trouver un premier emploi ?

C’est à cette question que l’association tente de répondre en comparant le nombre de 15-29 ans par rapport à celui des 0-14 ans.

  • résultats : Nantes, Grenoble, Strasbourg et Montpellier comptent nettement plus d’étudiants et de jeunes actifs (15-29 ans) que d’enfants (0-14 ans).

  • En moyenne, les quatre villes voient cette population plus nombreuse de 47 %. En clair, pour 100 enfants, elles comptent 147 ados et adultes de moins de 30 ans.

  • A Toulon, ces 6 % de plus seulement. « notre ville attire 8 fois moins les jeunes que les agglomérations dynamiques de taille similaire », déplore Toulon@venir. Un chiffre qui traduit selon l’association « le manque d’infrastructure d’enseignement supérieur dans notre agglomération. »
  • Pour compléter l’étude de l’association, notons qu’à Rouen, l’augmentation est très légère et qu’à Douai-Lens, les 15-29, sont moins nombreux que les 0-14 ans.

Les étudiants rares

  • combien de jeunes de 18 à 24 ans poursuivent des études alors que la scolarité n’est plus obligatoire ?

    • Dans les villes « dynamiques », c’est en moyenne 67,3 % de la tranche d’âge qui poursuit sa formation.

    • A Toulon, le chiffre plonge à 47,7 % (40 % à Douai-Lens).

  • Autre chiffre pour traduire cette réalité : le pourcentage d’étudiants dans la population.

    • C’est 11,2 % en moyenne à Nantes, Grenoble, Strasbourg et Montpellier.

    • C’est 2,7 % à Toulon. « Ce chiffre traduit principalement la faiblesse de notre université (9000 étudiants), qui fait de Toulon une exception française », analyse Toulon@venir.

 

Des transports en commun trop peu utilisé

La politique de transports en commun est surveillée de près par Toulon@venir, qui figure dans le collectif prônant la création d’un tramway.

Aussi, elle s’est intéressée au sujet en notant qu’à Nantes, Grenoble Strasbourg et Montpellier, quelque 20 % des salariés empruntent les transports en commun. Ils ne sont 8,3% à Toulon, (11,5 à Rouen et 6,3 à Douai-Lens).

Sans surprise, l’association ne rate pas cette occasion pour proposer de corriger cette donnée en faisant courir des rails de tramway d’Est en Ouest dans l’agglomération.

Les résidences secondaires gonflent les loyers

Dans le paysage du logement, Toulon détonne franchement. Ses rivages et son soleil faussent la donne.

  • 15,7 % des logements sont en effet des résidences secondaires. Dans les autres villes retenues par Toulon@venir, c’est 2,1 % seulement des logements qui sont destinés aux loisirs. Résultat, à Toulon, « l’utilisation d’un nombre important de logements en résidences secondaires est un facteur aggravant pour les tensions sur le marché locatif dans l’aire toulonnaise », note l’association.

  • Du côté du logement social « l’unité urbaine de Toulon est en retard », tonne l’association qui y pointe 9,9 % de logements sociaux contre 13 % à Montpellier, 16,1 à Grenoble, 16,4 % à Nantes et 20,3 % à Strasbourg.

  • A contrario, la part de propriétaires est plus élevée à Toulon (54,8 %) qu’ailleurs (54,8 % à Montpellier, 52,4 à Nantes, 52 % à Grenoble et 36,9 à Strasbourg.

Beaucoup de retraités, peu de cadres

  • parmi la population active de plus de 15 ans, Nantes, Grenoble, Strasbourg et Montpellier affichent en moyenne 12,5 % de cadres et professions intellectuelles.

  • A Toulon, ce chiffre plonge à 6,7 %.

    « Ce retard majeur se traduit économiquement par un manque de créativité, d’innovation et un tissu de start-up très faible », regrette Toulon@venir.

  • Dans les villes que l’association a mis de côté aussi, le taux de cadres est un peu plus important qu’à Toulon (8,2 % à Rouen, 7, 5 % à Douai-Lens).

  • Les retraités, en revanche, sont très largement pus nombreux qu’ailleurs à Toulon. 31,2 % des plus de 15 ans sont à la retraite au bord de la rade.

  • Dans les autres villes, c’est 22 à 23 %.

    « Ceci représente une ressource intéressante de dynamisme dans le secteur des services à la personne, mais incomparable avec le dynamisme engendré par les PME innovantes et technologiques par exemple », note l’association.

Pas si pauvres que ça

  • 24 172 euros.

    C’est en moyenne le niveau de revenu annuel d’un Toulonnais selon les chiffres de l’Insee. Résultat, 56 % des foyers fiscaux sont imposables et s’acquittent d’un impôt sur le revenu moyen de 1 426 euros par an.

  • Les autres agglos affichent un revenu annuel moyen de 25 959 euros, 59,4 % de foyers fiscaux imposables et un impôt moyen de 1 671 euros.

    « Sur le plan des revenus, Toulon est un peu en retrait, mais la différence avec les agglomérations dynamiques est cette fois assez faible », analyse Toulon@venir. « L’aire Toulonnaise n’est donc pas pauvre (…) mais légèrement moins riche que les agglomérations dynamiques. Il n’y a donc aucune raison à ce que les équipements de notre agglomération (transport, enseignement supérieur, recherche et innovation) soient inférieurs à ceux des agglomérations dynamiques. »

Toulon@venir propose un incubateur de start-up

Une fois posé le diagnostic, l’association « citoyenne » prescrit un remède pour doper l’agglomération toulonnaise.

« Il est nécessaire d’engager les mutations profondes », estime-t-elle. Elle prône, par exemple, de doper le logement social, de créer une ligne de tramway ou de renforcer le réseau TER.

« Il est aussi de la plus haute importance de faire des efforts sur l’enseignement supérieur en les axant sur les spécificités et les atouts de notre territoire. A ce titre, la création de Seatech (1) est une excellente nouvelle. Il faut toutefois aller beaucoup plus loin. Le développement de notre université doit aller de pair avec le développement de l’écosystème “entreprises innovantes” . Une possibilité serait de faire de Toulon un territoire d’émergences de start-up. Notre proposition principale est de construire à Toulon le pendant de la Halle Frayssinet, à Paris, qui deviendra, en 2016, le plus grand incubateur du monde, avec 30 000 m2 de surfaces destinées à accueillir 1 000 start-up innovantes, tous secteurs confondus.

A Toulon, il serait pertinent de créer ou de rénover une surface équivalente, de 10 000 m2. Un tel lieu pourrait se dessiner à l’emplacement actuel de l’hôpital Chalucet.

Notre ville pourrait compenser assez rapidement son retard accumulé en accueillant des entreprises à fort potentiel de croissance, permettant un rééquilibrage accéléré de notre économie. »

  1. École publique d’ingénieurs interne à l’université de Toulon, ouverte aux sciences et technologies marines

LA REACTION D’HUBERT FALCO

Dénonçant le « Toulon bashing » (lynchage médiatique, NDLR), le maire de Toulon Hubert Falco ne souhaite pas commenter l’étude rédigée par Toulon@venir.

« Je ne vais pas réagir », grince le maire. « Je m’occupe de Toulon et des Toulonnais. J’ai autre chose à faire que de commenter la morosité des membres de Toulon@venir. Et n’oublions pas que les Toulonnais ont réagi avec leur bulletin de vote en mars. »